she ain't a stranger to the city life (@Karla Briskers)

tu t’es regardé combien de fois dans le miroir aujourd’hui asmar ? t’en sais trop rien, peut-être une centaine fois de trois. t’as vu ton père dans le reflet ce matin, ça t’a effrayé. putain. tu t’es enfermé chez toi jusqu’à ce que ce que ce foutu visage se casse, le cœur qui cogne contre ta tempe et la rage qui hurle au bout de tes doigts. tu détestes cet appart, il te rappelle le foutu taudis dans lequel tu vivais avec tes parents, tu pensais changer de vie changer d’air changer de sang mais la vie c’est pas si simple et vu l’argent que tu te fais c’est mieux que rien. t’as essayé de mettre de la déco, de rendre le truc un peu vivant, les plantes sont mortes, le papier peint aussi. tu te sens crever quand tu restes trop longtemps là, les murs blancs, le silence qui résonne c’est pas pour toi. alors, la nuit, tu erres, tu te nourris des klaxons des voitures et des vibrassions des trains qui passent sous tes pieds. tu cognes sur les murs en rythme pourvu qu’ils te suivent et tu murmures ta haine pourvu qu’elle te quitte. comme à chaque fois que tu te sens vriller tu retournes mécaniquement sur ce fameux toit où tu l’as rencontrée, elle. tu connais même pas son nom, c’est d’un commun accord. elle en sait déjà beaucoup sur toi, asmar, plus que tu ne le voudrais. avec ses allures de succube, elle te soutirerait la recette secrète du coca-cola si tu l’avais. pas de faux-semblants, y a qu’elle la nuit et toi, effaçant la frontière entre le rêve et la réalité. t’escalades à la hâte, tu sais qu’elle sera là, tu le sens. y a ce truc un peu mystique qui fait que t’y es toujours quand elle a besoin de toi et inversement. peut-être qu'elle existe même pas la fée, peut-être que t'es devenu fou. les lumières de la ville t'aveuglent quand t'arrives au sommet, tu mets ta main devant tes yeux pour échapper à l'agression. quand ta main retombe t’aperçois sa silhouette. c'est elle. tu te racles la gorge et viens t'asseoir à coté d'elle, face aux lumières de la ville. j'suis pas en retard, j'espère. et comme à chaque fois que tu l'aperçois y a tout qui redescend, c'est fou. t'espères intérieurement que c'est la même chose pour elle sinon tu te sentirais bien con.

karla elle se précipite dans les escaliers, elle grimpe vite, trop vite. elle manque même quelques marches par ci, par là. elle a le rythme cardiaque qui s’accélère mais elle s’arrête pas, jusqu’à arriver au sommet. elle pousse la porte de fer et là, c’est l’apaisement. le soulagement. elle est seule, au-dessus du monde, au-dessus des autres. silhouette plantée là au milieu des bruits de klaxons et du vent qui la malmène. elle, poupée de cire frêle et sans vie, trop vide pour tenir le choc d’une brise trop violente. mais elle respire, y’a eu cette chose dans sa tête qui lui disait de monter tout là-haut. une question de vie ou de mort, de raisons ou de torts. et rapidement cet endroit est devenu un besoin vital, une envie de voyager, de tout quitter. elle attend là karla, l’inconnu de ses nuits. elle sait que tu viendras, tu viens toujours de toute façon. karla face à la lune, trop près du vide et trop loin des autres. elle admire la lune, elle n’a d’yeux que pour elle. karla elle veut pas toucher les nuages, elle les trouves insignifiants, vide, sans charisme, trop nombreux et se ressemblent tous. non, karla elle veut être similaire à la lune. unique, lumineuse, intouchable. puis elle est pas parfaite elle aussi, elle a des cicatrices, des fissures mais même avec elle reste le plus beaux des astres. et karla rêvasse quand la voix masculine retentit dans son dos. - si, un peu.. qu’elle réplique sourire aux lèvres. elle se retourne enfin, te faire face à toi qui se mélange que trop bien à la pénombre. - t’as de quoi te faire pardonner ? qu’elle demande. capricieuse la princesse de débris. karla elle aime ces moments, elle aime ta présence. tu lui fais du bien, tu connais aucun détail mais tu connais ses profondeurs. les maux qui la lacèrent quand tu t’en vas.

il te reste pas grand-chose du début de ta soirée à part peut-être le souvenir d’un corps étranger endormi sur ton lit et une trace de rouge à lèvres dans la nuque. elle t’attendait dans la pénombre, la poupée. tu peux pas concevoir qu’elle soit ici toute seule à ruminer. tu voudrais la cacher de la misère du monde et lui faire voir la beauté de la terre. tu la regardes entièrement à la recherche d’une trace visible de souffrance sur sa peau. ça te fout en rogne de la savoir brisée et si tu peux pas soigner ses blessures tu peux au moins essayer de les lui faire oublier. le temps semble s’être arrêté depuis que t’es arrivé au lieu de rendez-vous comme pour vous laisser profiter de cette liaison parfaitement dangereuse car consommatrice des tréfonds de ton âme. évidemment que t’as essayé, plein de fois, de l’oublier cette fille aux cheveux blonds sur ce putain de toit et à chaque fois t’y retournes. ta compagne d’infortune s’impatiente tu me connais que tu lâches comme si c’était pas un sujet de dispute avec ton fort intérieur quand la nuit s’éternise. tu connais même pas son nom et voilà que tu sors un joint déjà roulé pour lui passer. putain. t’as l’impression dans une putain de fiction, dans un texte beaucoup trop pur pour qu’il soit de toi. vite, tu sors le briquet de manière à faire taire la voix de la culpabilité qui te maudit chaque fois que tu la rejoins. t’allumes le joint de la princesse sans la lâcher du regard, peut-être que comme ça t’arrivera à savoir ce qui la tracasse avant qu’elle te le dise. t’es attentif à ses gestes, à l’affût du moindre aveu que son corps sinon sa bouche voudra bien te livrer. ça fait longtemps que t’es là ?