Ton soupire se fond dans l’air dans une nuage pâle. Un découragement et une prise au cœur en voyant cette paire de jambes dans l’éclat de la lune. Un corps dissimulé dans la noirceur de la nuit, inatteignable par les néons des lampadaires. Discret des yeux curieux. Tes talons claquèrent contre l’asphalte alors que tu séparas la distance entre vos deux âmes. Tes bouclettes collaient contre ton rouge-à-lèvre éclatant de ton deuxième boulot de la journée. Drainée de tout énergie, voir ce jeune homme aussi atterré par la vie t’offrais un regain. Une obligation de garder les yeux ouverts et d’être alerte. Tu t’accroupis à ses côtés en posant une main contre le mur derrière son échine pour te soutenir alors que la seconde se porta à sa chevelure foncée pour dégager les mèches de son front. T’appréciais la vue de ce tatouage si simple au-dessus de son arcade sourcilière. Un peu moins lorsque celle-ci s’était fait éclatée sûrement à la suite d’un combat. « Une vraie œuvre d’art. » Murmures-tu lorsque ton regard croisa finalement le sien. Il n’était pas content. La bête était enragée, l’honneur saccagé et son regard aussi âcre venait faire vibrer tes veines. Ils te rappelaient ces yeux qui t’ont hanté toute ta jeunesse. Tu le lâches, brièvement, sachant qu’il ne faut jamais avoir un contact aussi brusque avec un animal sauvage. Mais tu t’installes, ton manteau blanc détruit par la saleté d’un univers qui ne t’appartenait pas. Tu poses ton menton dans le creux de ta main et tu le regardes avec une détermination déconcertante. L’inquiétude allait te rouler sur la langue une autre nuit. Tu n’allais pas fuir à la vue de ces dents au goût de fer et à ses mots si amers. « J’ose pas imaginer la tête de l’autre mec. » et pourtant tu lui souris. Même s’il n’avait peut-être pas forcément envie de voir cet expression sur ton visage, tu ne pouvais t’en empêcher.