- blame it on the alcohol
Il ne savait pas combien de fois il avait poussé cette porte, mais la forte odeur d’alcool et de transpiration ne semblaient plus autant le gêner qu’autrefois. Le sol était plus que collant, dégoutant, mais d’après Ivy c’était ce qui rendait un bar authentique. Et elle s’y connaissait en matière de bars. Par pure habitude, il serrait la main du barman avant d’adresser un signe de la main aux personnes déjà présentes dans la salle. C’était presque comme rentrer chez sa mère pour le week-end. Il n’avait qu’à poser ses fesses sur l’un des tabourets du bar et on lui servirait la même chose qu’à chaque fois, sans qu’il n’ait à prononcer un mot. Il sortait son téléphone de la poche de sa veste en se dirigeant vers le comptoir ; aucune réponse pour l’instant. Il avait envoyé un message sur leur fameux groupe whatsapp pour leur dire qu’il serait au bar plus tôt que d’habitude. Il aurait pu attendre chez lui, mais ils savaient que ces ivrognes seraient heureux d’arriver plus tôt. Plus de temps, plus de verres. Le rituel s’était installé sans prévenir, sans même qu’ils ne s’en rendent. C’était arrivé un jeudi, puis un autre et au final c’était devenu leur moment sacré de la semaine. Rien ne pourrait annuler la soirée du jeudi soir. Au départ, Robbie rejoignait Fran et Diego, puis quelques années plus tard, une représentante de la gente féminine s’ajoutait au trio. A l’époque, elle était nouvelle en ville, Ivy, alors Robbie l’avait trainée avec lui –pas de force bien sûr, il n’avait fallu que du mot alcool pour la convaincre- pour lui changer les idées, pour lui faire rencontrer de nouveaux visages. Et elle n’était jamais repartie. Perdu dans ses pensées, il n’avait même pas fait attention à la porte d’entrée qui s’ouvrait de nouveau, laissant passer un courant d’air jusqu’à lui. La sensation du froid sur sa nuque le faisait se retourner. Il levait alors son verre en leur direction. « J’ai failli ne pas vous attendre. » Dans son dos, le barman commençait à préparer les trois autres verres sachant d’ores et déjà que ce serait les premières paroles des nouveaux arrivants. On les connaissait que trop bien dans les parages. Le trio de quarantenaires un peu paumés, avec cette jeune femme au milieu qui rit bien de leurs déboires. Un signe de tête vers eux, une tape amicale sur l’épaule ou la joue, un sourire en coin. Robbie tapotait le tabouret à côté de lui pour qu’ils le rejoignent avant de replonger son nez dans son verre.

(@ivy gillespie, @diego ortiz, @fran brynes, dans l'ordre que vous voulez babies)